Est-ce qu’il y a encore de la place en pratique autonome? : Réflexions stratégiques pour développer une pratique alignée

Je reçois souvent cette question de la part de professionnel·les en réflexion : « Est-ce qu’il y a encore des besoins en pratique autonome? » Et je sens, derrière ces mots, une forme d’inquiétude. Une pression, peut-être même. Comme si on cherchait à s’assurer qu’il reste une place pour soi, avant même de s’autoriser à rêver une pratique qui nous ressemble. 

Il faut dire que les réseaux sociaux débordent d’annonces : nouvelles pratiques, nouveaux services, nouveaux logos. De quoi donner l’impression que le sentier est déjà bien rempli, voire bouché. Ce qui peut génèrer, bien naturellement, une certaine anxiété de performance chez celles et ceux qui envisagent de s’y engager. 

Mais poser la question des besoins uniquement du point de vue de la clientèle, c’est selon moi oublier l’autre moitié de l’équation : Est-ce que la pratique autonome correspond aussi à mes besoins, à moi, comme intervenant·e? Est-ce que j’ai envie, mais aussi la capacité de défricher mon propre chemin? D’avancer à mon rythme, dans des conditions qui me respectent, avec un sac à dos adapté à mes forces, à mes besoins et à mes limites? C’est ce que j’appelle souvent explorer son terrain de jeu professionnel. 

Dans cet article, je propose de regarder ensemble le paysage, identifier les fausses impressions de saturation, repérer les vrais besoins (chez les clients et chez soi) et réfléchir, stratégiquement et humainement, à la suite. Car la réponse courte c’est oui, il y a encore de la place. Mais pas nécessairement sans boussole, ni sans préparation. 

Pratique autonome : entre visibilité et réalité terrain

C'est un fait, la pratique autonome gagne en popularité. De plus en plus de professionnel·les du domaine de la relation d’aide choisissent de quitter (ou de compléter) leur emploi salarié pour exercer en pratique autonome, souvent attiré·es par la flexibilité, l’autonomie, ou encore le désir d’offrir des services plus alignés avec leurs valeurs. 

Cette tendance est particulièrement visible sur les réseaux sociaux, où les annonces d’ouverture de bureaux, la présentation de logos fraîchement créés ou de nouvelles disponibilités s’affichent. À force de voir défiler ces publications, on peut facilement avoir l’impression que « tout le monde se part en privé ». Mais cette visibilité accrue ne reflète pas nécessairement une saturation réelle du terrain. 

D’abord, il faut rappeler qu'une bonne proportion des entreprises en démarrage ne franchissent pas le cap des premières années. Ce qu’on voit en ligne est donc souvent une vitrine temporaire, qui ne dit rien sur la solidité ou la pérennité d’une pratique. Ensuite, notre perception est biaisée par l’algorithme et notre attention. C’est certain que si tu suis des groupes Facebook, des pages ou des comptes liés à la pratique autonome, tu verras davantage d’annonces de lancements et d’initiatives privées qu’avant. Mais ce n’est pas nécessairement parce qu’il y en a beaucoup plus, c’est aussi parce que : « What you focus on expands. » Ton regard est simplement plus tourné vers ce type de pratique et c’est normal si tu t’y intéresses. 

Donc ce n'est pas parce qu’on voit beaucoup de monde chausser leurs bottes que tout le monde a trouvé son sentier, ou se rendra à destination... Derrière les publications, plusieurs professionnel·les vivent des défis bien réels : manque de clarté, offres peu différenciées, difficulté à attirer une clientèle cohérente, précipitation dans la mise en marché. Certain·es finissent même par se décourager ou par rebrousser chemin. 

La croissance du secteur est réelle, oui. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a plus de place. Je suis d’avis que cela signifie plutôt qu’il devient essentiel d’avancer avec plus de clarté, plus de stratégie et davantage d’authenticité. 

Où se trouvent les vrais besoins en pratique autonome?

Maintenant que l’on a dépassé l'illusion d’un sentier bondé, parlons du terrain réel : celui des besoins. Car oui, il y en a encore. Mais ils ne sont pas nécessairement répartis également à travers toutes les clientèles, approches ou modalités de pratique.

Pour les repérer, il est pertinent de sortir d’une vision uniforme de la pratique et s’intéresser aux zones moins visibles, celles où les besoins sont bien présents, mais encore mal desservis. Il est aussi judicieux de porter attention aux angles morts du système actuel, là où les approches innovantes ou les réalités marginalisées peinent à trouver leur place. 

La clé, ce n’est donc pas simplement de « se partir en privé » avec une offre large et générique, mais de prendre le temps d’examiner le terrain, de repérer les chemins moins battus et de voir comment tu pourrais y contribuer avec cohérence et pertinence.

Cela demande parfois d’accepter que certains créneaux semblent déjà bien comblés. Et c’est là que la réflexion stratégique entre en jeu : 

  • Est-ce que je peux adapter mon positionnement? 

  • Est-ce que je peux approcher ce besoin autrement, avec ma couleur à moi? 

Ce type de réflexion est justement ce qu’on aborde dès les premières étapes dans ConcrétisAction, pour éviter de partir en randonnée avec une carte empruntée à quelqu’un d’autre. 

Se démarquer en pratique autonome grâce à un positionnement clair

Dans un contexte où l’offre se multiplie, ce n’est pas le simple fait d’être « en pratique autonome » qui te permettra de te démarquer et de remplir ton horaire, mais la clarté de ton positionnement. C’est ce qui te permet de sortir du lot, d’attirer les bonnes personnes et surtout, de bâtir une pratique durable, cohérente, alignée avec qui tu es. 

Trop souvent, on tente de modéliser ce que l’on voit autour de soi : un site web inspiré d’un autre, une offre de services aussi vaste qu’indéfinie, des publications qui suivent une recette. 
Mais copier-coller ce que les autres font, même inconsciemment, n’est pas une stratégie viable à long terme. Pourquoi? Parce que c’est un peu comme enfiler les bottes de randonnée de quelqu’un d’autre : elles ne sont peut-être pas ta pointure, ni adaptées à ton type de terrain. Tu risques de t’essouffler plus vite, de perdre tes repères, de te blesser ou de décrocher complètement.

Définir ton positionnement, c’est accepter de ralentir pour mieux t’orienter. C’est te poser des questions centrales : 

  • À qui veux-tu vraiment t’adresser, et pourquoi? 

  • Quelles problématiques, clientèles ou contextes te font vibrer? 

  • Quel est ton style d’intervention, ta posture, ton énergie? 

  • Qu’est-ce qui te rend unique, au-delà de ton diplôme ou de ton titre professionnel? 

C’est aussi un travail d’ancrage identitaire : faire le pont entre ce que tu sais, ce que tu es, et ce que tu souhaites offrir. Ce positionnement devient ton fil d’Ariane : il t’aide à faire des choix plus clairs, à créer une offre cohérente et à bâtir une pratique qui te ressemble vraiment. 

Et bonne nouvelle : il n’a pas besoin d’être figé. Il peut (et doit!) évoluer. Mais plus tu le clarifies tôt, plus tu risques de gagner en stabilité et en liberté. 

C’est une étape que j’adore accompagner dans ConcrétisAction, car c’est souvent là que la lumière s’allume : quand on réalise qu’on n’a pas besoin de « tout faire », de faire comme les autres ou de plaire à tout le monde, seulement de s’autoriser à être pleinement soi, dans sa pratique. 

Prendre le temps de réfléchir avant de démarrer sa pratique autonome

Quand on commence à entrevoir la possibilité de se lancer en pratique autonome, deux réactions opposées apparaissent souvent : 
- D’un côté, l’enthousiasme débordant : on veut tout mettre en place rapidement — réserver un nom, créer un logo, ouvrir une page Facebook, offrir ses premiers rendez-vous. 
- De l’autre, l’analyse paralysante : on remet tout à plus tard, on attend d’être « prêt·e », on s’enlise dans le doute et la comparaison. 

Ces deux réactions sont normales… mais dans les deux cas, on risque de manquer l’essentiel : un arrêt pour réfléchir au projet qu’on veut vraiment construire. Parce que se lancer en pratique autonome, ce n’est pas une simple sortie d’une journée. C’est une expédition, qui demande d’être préparée avec soin. Et cette préparation commence par une réflexion stratégique, autant sur les besoins du terrain que sur tes propres besoins, comme professionnel·le. 


Avant de gravir une montagne, on prend le temps de : 

  • Choisir un itinéraire adapté à son niveau 

  • Préparer son sac avec les bons outils (pas trop, pas trop peu) 

  • Évaluer son rythme, ses forces, ses limites 

  • Et surtout, s’assurer qu’on veut vraiment monter cette montagne-là 

En pratique autonome, c’est pareil. Prendre le temps de réfléchir, c’est : 

  • Éviter de bâtir une offre générique ou déconnectée de ses valeurs 

  • Identifier ce qui nous anime… et ce qu’on ne veut plus 

  • Définir des conditions de travail réalistes et respectueuses de soi 

  • S’autoriser à créer une pratique professionnelle à son image — et non à celle qu’on croit attendue

Ce type de réflexion ne ralentit pas le processus. Elle l’approfondit. Elle le solidifie. Elle t’évite de rebrousser chemin à mi-parcours, faute d’avoir choisi la bonne direction. 

Il y a encore de la place, mais pas nécessairement sans boussole 

Alors… est-ce qu’il y a encore des besoins en pratique autonome? Oui. Absolument. 
Mais pas nécessairement pour n’importe quelle offre. Pas à n’importe quelles conditions. 
Et surtout, selon moi, pas sans réflexion. 

Le paysage de la pratique autonome évolue. Il s’enrichit, se complexifie, se diversifie. 
Et il y a encore de la place pour des pratiques solides, créatives, éthiques, différenciées, respectueuses du cadre professionnel et de l’humain. Mais pour faire sa place il ne suffit plus de simplement offrir des suivis : il importe de comprendre à qui on veut s’adresser, comment on veut contribuer, et surtout, dans quelles conditions on veut travailler et s’épanouir. 

Tu n’as pas besoin d’aller vite. Tu as besoin de savoir vers où tu t’en vas. Avec une boussole, un plan, et une intention bien enracinée. 

Si tu es en réflexion ou en démarrage, je t’invite à t’arrêter un instant. À respirer. À repenser ton sac et son contenu, ton rythme, ton sentier. Et si tu veux être accompagné·e pour clarifier ton itinéraire, solidifier tes fondations et bâtir une pratique qui te ressemble vraiment, je t'invite à découvrir l’accompagnement ConcrétisAction. C’est un parcours structuré, humain et stratégique pour t’aider à transformer ton idée en une pratique autonome viable, alignée et cohérente. 

Stéphanie Villeneuve, travailleuse sociale

OTSTTSO: 834342

OTSTCFQ: VILS17/05/230TS

© 2025 Stéphanie Villeneuve

Tous droits réservés